« Elle était minuscule et elle prenait toute la place. Avec sa voix rauque de fumeuse, elle en imposait du haut de ses cinq pieds, juchée en permanence sur des talons aiguilles. Elle passait ses journées debout, à travailler sans relâche, et ce n'est qu'une fois à la maison, brisée de fatigue, qu'elle acceptait de descendre de cette estrade qui semblait lui permettre de tout diriger. L'homme de la maison, c'était elle, Mado, ma mère.Je l'admirais, je la craignais, je l'aimais énormément. Je lui en voulais d'être trop originale, pas tout à fait comme les mères normales de mon entourage; je lui reprochais tout bas d'être à la fois la mère et le père, puisque celui-ci avait quitté la maison alors qu'elle n'avait que trente-deux ans et cinq filles. Dans ce livre, par petits tableaux livrant les impressions qui restent en mémoire, j'ai tenté de raconter Mado, ma mère. »