Catherine, à la différence de sa mère et de son père, est dotée de l’ouïe et de la parole, tandis que la société a accolé à ses parents l’étiquette de « sourds-muets ». Ainsi, dès son âge le plus tendre, Catherine devra malgré elle se faire leur interprète, leur lien avec le monde, la dépositaire de tous leurs secrets. Dans Muette, elle nous raconte son enfance semblable à nulle autre, partagée entre la honte de ses géniteurs et l’appel irrésistible de leur amour, entre sa mère à qui la parole a été refusée et sa grand-mère qui parle trop. Car si les deux femmes de sa vie ont quelque chose en commun, l’une dans ses cris informes et l’autre dans son babil inextinguible, c’est que ni l’une ni l’autre n’a conscience des limites, n’a conscience de ce qu’une fillette peut ou ne peut pas, doit ou ne doit pas, savoir. Traversée par toutes ces paroles, Catherine apprendra peu à peu à écouter sa propre voix, à l’imposer, à donner un sens au chaos sonore dans lequel l’a plongée sa naissance.